“Enfant, j’étais captivée par l’imaginaire fantasmagorique qui débordait de l’album de famille de mes parents. J’aimais beaucoup m’y plonger en mes heures perdues, surtout à l’heure de leur sieste. Je me racontais alors un tas d’histoires romancées, inspirées des films égyptiens diffusés alors à la télé libanaise. Plus tard, j’avais quitté le Liban en emportant une seule photo dans ma valise : celle de mon petit copain en maillot de bain, me souriant sur la plage. Mes photos de famille, le besoin de les (a) voir ici chez moi en France, est arrivé bien plus tard. Je ne pourrai pas dire quand exactement. Mais depuis quelques années, je remarquais que ma mère me les concédait de plus en plus volontiers à chaque passage au Liban. Alors je me suis demandé si l’âge avançant, ma mère ne cherchait pas à me léguer via ces photos, une mémoire de famille faite justement pour être transmise et enrichie d’ascendant en descendant. Et si, comme dans une passation de bijoux de famille, elle ne me chargeait pas inconsciemment de les confier un jour à mon tour à mes nièces et neveux, faute d’avoir moi-même d’enfants.” R.S.
“À partir d’un certain nombre d’années après la mort, le visage ne change plus. La netteté des traits, le feu des pupilles, le brillant du regard demeurent. Le temps est vaincu. L’être cher est là, devant nous, en photo, et le sera à tout jamais. Nimbé d’une aura éternelle. L’usure n’a plus de prise sur lui. Son portrait n’est plus seulement un portrait : il est l’être disparu lui-même. Inaccessible au temps désormais. Intouché. Intouchable. Vivant. Et ainsi dans les siècles des siècles.
De toutes et tous que reste-t-il à la fin ? Quelques photos. Un portrait que l’on se transmet, que l’on ressort de loin en loin pour montrer aux petits-enfants et aux arrière-petits-enfants qui était Oncle Pierre, qui était Mamie d’Oran.” S.P.
Rima Samman
Artiste, Auteur, Cinéaste, Vidéaste
Réalisatrice et artiste pluridisciplinaire née au Liban, Rima Samman obtient son diplôme d’Orthoptie de la Faculté de Médecine Pierre et Marie Curie, avant d’interrompre sa thèse en Sociolinguistique arabe à la Nouvelle Sorbonne pour travailler dans le cinéma.
À ses débuts, elle occupe divers postes sur de nombreux films d’auteurs parmi eux Philippe Ramos, Ziad Doueri et Bruno Dumont, tout en écrivant et réalisant ses propres films.
Cinéaste éclectique, ses films de fiction sont préachetés par France 3 et Arte et primés dans de nombreux festivals, tandis que ses films expérimentaux et ses essais sont diffusés dans les festivals et les musées, et projetés en avant séance dans les salles de cinéma.
Actuellement, elle travaille sur deux longs métrages, Dans le cœur une hirondelle (en recherche de financement de production) et Tout sur mon père (en écriture).
En septembre 2020, elle expose (images et vidéo) au festival photos Portrait(s) de Vichy, aux côtés de Charles Fréger, Ed Alcock, Chris Steelle-Perkins, Arlène Gottfried, Bruce Wrighton, Sébastien Camboulive, Alexis Cordesse, Paul Pouvreau, Danielle Levitt, Claudine Doury.
Sylvain Prudhomme
Auteur, Ecrivain
Sylvain Prudhomme a passé son enfance dans différents pays d’Afrique (Cameroun, Burundi, Niger, île Maurice) avant de venir étudier les Lettres à Paris, puis de diriger de 2010 à 2012 l’Alliance franco-sénégalaise de Ziguinchor, au Sénégal. Il est agrégé de lettres modernes.
Il est allé recueillir des contes dans le nord du Bénin qu’il a publiés sous le titre Contes du pays tammari, (Karthala, 2003). Il est également l’auteur de Les Matinées d’Hercule (Serpent à Plumes, 2007), monologue romanesque sur le thème de l’homme qui dort et du voyage immobile et de Tanganyika Project (Léo Scheer, 2010).
Sylvain Prudhomme est le lauréat 2019 du prix Femina et du prix Landerneau des lecteurs pour son roman Par les routes.