Groupés entre eux parce qu’ils sont identiques, ils cherchent ce qui leur ressemble, à savoir les monuments, typiques, identifiables, marqués. (…)
Photographier un monument, c’est fabriquer une carte postale. Se photographier devant le monument, c’est pénétrer dans la carte postale, devenir immortel, présenter à ses amis une image où l’on trône au bras de la Grande Pyramide, avec le sourire de celui qui fait la couverture de Paris-Match.
Les touristes se veulent personnages de bande dessinée. Tintin devient intéressant par le lieu qu’il s’attribue : “Tintin aux pays des soviets” “Tintin au Congo” “Tintin en Amérique”. Or, Tintin, en soi, est vide comme un touriste.
Le touriste, de vide en vide, devient collectionneur. Ainsi, de trophées en trophées, peut-il se comparer et tenter de se distinguer de son collègue. Mais, de même manière que les stars se ressemblent toutes, dissimulées derrière des lunettes de soleil et sous de faux cheveux blonds, les touristes ne se distinguent pas. Et, de même que les stars sont faussement célèbres, car il n’existe qu’une star, toujours la même, occupée par tel ou tel nom de l’instant, les monuments sont faussement renommés. […]
Jean-Luc Coudray